L’hiver, le thé et nous

L’hiver, le thé et nous

On ne peut se le cacher : l’hiver, le vrai, est là. La neige est tombée, la lumière rougeâtre d’automne a fait place à une lumière bleutée, les arbres sont nus et nous… bien couverts, repliés sous nos manteaux et nos couettes ! Une envie, un besoin, de ralentir et se recroqueviller. Pour mieux se retrouver.

Les théiers, sempervirents, font de même. Ils rentrent en dormance. Jusqu’à la fin Mars ils ne produiront plus de bourgeons. Ils se rechargent. Pour cette raison il existe des thés de printemps, d’été et d’automne. Mais pas de thé d’hiver, sauf exception.

On vous incite ici à consommer, comme les fruits et légumes, des thés dits « de saison ». Pour autant est-ce une raison pour s’abstenir d’apprécier cette divine boisson cet hiver ? Bien entendu non, l’hiver étant justement propice au rassemblement et au lien.

Nous vous proposons ici quelques accords avec la saison qui débute tout juste, afin que le thé entre en symbiose avec ce nouvel état. S’il n’existe pas de règle, vous pouvez boire tous les thés en toute saison, certains nous semblent plus appropriés.

 

Les accords généraux

Des notes chocolatées, empyreumatiques, miellés, de fruits à coques ou de sous-bois correspondent bien au besoin de chaleur de l’hiver. Elles créent une sensation de bien-être et de douceur face à la rudesse et au mordant du dehors. Ces notes rondes, pesantes sans être lourdes, nous enveloppent, nous rassurent. Comme une amie bienveillante, comme un feu ronflant dans une cheminée.

Ainsi les thés oxydés, peu oxydés et torréfiés, ou fermentés seront à privilégier. Il en existe une infinité, dans chaque catégorie. Des notes allant du cacao au cuir fauve, en passant par les flaveurs de noisettes torréfiées.

Voilà une sélection très parcellaire de quelques thés qui s’accorderont bien avec l’état du moment.

Les oolongs

Catégorie la plus large en terme d’oxydation, de 10 à 70%, les oolongs disposent d’une palette aromatique infinie. On privilégiera ici les oolongs les plus oxydés tels que :

- Les thés des Wuyi shan, montagnes du Nord Fujian, comme les Da Hong Pao, Rou Gui ou encore Qi Lan. Cannelle, chocolat, fleurs jaunes mais aussi fruits compotés, sont ici de la partie. Soutenues par une minéralité propre à ces thés d’exception. Hormis le Dao Hong Pao ils sont beaucoup moins connus que leur cousin du Sud Fujian, le Tie Guan Yin, à l’oxydation souvent beaucoup moins poussée.

N’allez cependant pas croire qu’un Tie Guan Yin ne peut rentrer chez vous cet hiver : il existe en effet un Tie Guan Yin « antique », à l’oxydation et la torréfaction poussée, moelleux, aux arômes boisés. Si vous demandez un tel thé à votre revendeur insistez-bien sur le terme « antique ».

- A la frontière du Guangdong et du Fujian sont produits les Feng Huang Dan Cong, thés particulièrement complexes, aux notes de fruits confits/fruits compotés, de café et de caramel, mêlées aux épices.

- Certains oolongs taïwanais seront également parfaitement adaptés. Le fameux oriental beauty, de son vrai nom Dong Fang Mei Ren, mordu par un minuscule criquet, délivrera de douces flaveurs de muscat.

Toujours à Taïwan les dong ding antique seront particulièrement appréciés, grâce à leurs saveurs caramélisées, boisées et de pain grillé.

Pas dans la neige

Les thés rouges

Appelés thés noirs dans le monde occidental, les thés sont rouges en Chine. C’est ainsi que nous les appelons ici.

On pense souvent connaitre ce thé car c’est souvent celui que l’on a bu en premier, que l’on boit dans les hôtels et chez nos amis peu portés sur la chose. Souvent dans un sachet jaune ce thé ci n’a rien à voir avec les thés dont on fera mention ici.

 

De manière générale tous les thés rouges, avec leur belle rondeur, leurs saveurs de fruits compotés, boisées et parfois animales seront très appréciés. On vous emmène faire un très très bref tour d’horizon.

- Une fois n’est pas coutume on commencera par les thés indiens. Le Darjeeling, au nord Est de l’Inde, règne ici en dieu et maître. Les récoltes de printemps, d’été ou d’automne auront des goûts bien distincts. A privilégier cet hiver : les récoltes d’été dites « muscatel », comme l’oriental beauty de Taïwan, aux arômes boisés, de fruits cuits, de fleurs odorantes ; et les récoltes d’automne aux arômes de muscade, de bois et de fruits cuits.

Les thés beaucoup moins connus, et beaucoup moins chers, de la région voisine de Sikkim seront également très appréciés. Pas facile de s’en procurer néanmoins.

Plus à l’Est l’Assam bénéficie de quelques belles productions. Les montagnes des Nilgiri, au sud dans le Tamil Nadu, commencent à voir ça et là quelques productions intéressantes.

 

- En Chine trois types de thés font références :

o Le Keemun, thé de l’Anhui, aux saveurs de cuir de Russie et cacaotées.

o Le Keemun (ou Qi Men) Mao Feng, également produit dans l’Anhui. Les notes sont miellées, chocolatées et fruits compotés. Un thé complexe et élégant.

o Les thés du Yunnan, fleuris, boisés et miellés. Sans aucune amertume. Un thé d’une grande douceur, facile à appréhender.

 

- En Corée enfin le Jukro fait des merveilles. Lacté, chocolaté, vanillé, long en bouche et complexe il en ravira plus d’un.

Les thés fermentés

Représentant incontestable de cette catégorie, mais loin d’être le seul, le Pu’erh bénéficie lui aussi d’un IGP. Deux catégories, aux arômes radicalement différents, ici : le « shu » et le « sheng ». Pour son côté doux, de sous-bois, sans aucune amertume on privilégiera éventuellement le « shu » ou Pu’erh cuit. Attention : là aussi il existe d’IMMENSES différences dans cette catégorie. Si le côté humus, sous-bois voire cave est trop présent : fuyez ! Un bon Pu’erh shu doit être doux, tendre et rond, aux arômes confiturés et boisés mais certainement pas de moisi !

Les autres couleurs

Nous avons dû effectuer une sélection drastique, tailler dans le vif et rester parcellaires pour vous proposer une sélection sans écrire un livre entier. D’où le fait de ne pas avoir parlé des autres couleurs. Néanmoins en voici deux, pour le plaisir.

Certains thés verts, jaunes ou blanc se marieront parfaitement bien à la saison. Un grand Long Jing aux arômes de fruits à coques et de vanille, un Bai Hao Yin Zen aux accents de bois ciré et de miel seront aussi très appréciés.

 

En conclusion

S’il ne fallait en choisir qu’un ? De manière purement subjective ce serait un Yunnan d’or, d’une immense longueur en bouche et d’une grande complexité. Où bois mouillé, champignon, cuir, fruits compotés se mêlent harmonieusement et tout en douceur.

Maintenant il ne reste qu’à vous d’expérimenter ces accords, dans votre intimité. Plongez au cœur de votre ressenti, de votre humeur. Accordez-vous cette introspection et choisissez un thé en conséquence. Le thé deviendra alors l’élément de symbiose qui vous fera passer l’hiver au plus près de qui vous êtes vraiment.

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